Il en va de certaines commémorations comme des moustiques: elles sont indispensables dans l’écosystème qui nous entoure, mais on s’en passerait bien.
Au lendemain des cérémonies ayant marqué le 15e anniversaire des attentats de New York et de Washington (sans oublier Shanksville, en Pennsylvanie), on ne peut qu'avoir un goût étrange dans la bouche.
Ce 11 septembre 2001 semble à la fois si loin et pourtant si proche. Tout le monde, ou presque, se rappelle parfaitement ce qu’il faisait ce jour-là au moment où l’information est tombée. Les réseaux sociaux n’existaient pas encore, internet en était encore à ses débuts et les chaînes d’information continue, en Europe, étaient encore très peu présentes sur les canaux de télévision. La stupéfaction de tous fut à la hauteur de la dimension irréelle de ces événements.
Si loin et pourtant si proche… Car ce que Jean Spautz, alors président de la Chambre des députés, avait considéré comme étant «une attaque irrationnelle contre les valeurs sacrées du monde libre et démocratique» n’a eu de cesse de faire des émules, reléguant depuis bien longtemps aux oubliettes toute notion de raison. Nombreux sont les pays, qui, au cours de ces 15 dernières années, ont connu «leur» 11 septembre (et certains plusieurs fois, de surcroît), la violence émotionnelle du choc ne se mesurant pas forcément au nombre de noms gravés sur les mémoriaux.
Certes, s’il reste encore de la poussière et des gravats, ils ne sont guère plus que dans les souvenirs. Deux petites tours et puis s’en vont, laissant place à une nouvelle, plus grande, plus imposante, symbole de toujours plus de puissance que jamais, couvrant d’une ombre protectrice les deux bassins symbolisant les deux «anciennes» tours jumelles aujourd’hui disparues, et portant le nom des quelque 3.000 victimes de cette funeste journée.
En 15 ans, le monde a changé. Mais certainement pas de la manière dont il aurait pu, dont il aurait dû. Les belles promesses d’un ordre mondial nouveau se sont bien vite envolées; le Nord ne s’est pas vraiment davantage rapproché du Sud, et la toute-puissance supposée des uns est en train de leur revenir en pleine face, mais de manière tellement diffuse qu’ils ne sont pas capables d’en maîtriser l’impact.
Les habituelles manœuvres et jeux politiciens vont reprendre de plus belle, dans des joutes qui n’élèveront pas toujours le débat aussi haut qu’il devrait l’être.
Au milieu de ce tumulte incessant, le Luxembourg est, d’une certaine façon, passé entre les gouttes. Ses quelque 2.600km2 de territoire ont été préservés, son économie s’est globalement plutôt bien portée, et même si le taux de chômage de 2016 est trois fois supérieur à celui de 2001, sa population a augmenté de plus de 30%, l’emploi intérieur de près de 50% et le nombre de travailleurs frontaliers y venant chaque jour a pratiquement doublé.
Très fortement soumise aux variations de température de ses plus proches voisins, notamment, la santé du Luxembourg a su rester solide au fil de ces années. Bien sûr, les décisions politiques des uns (pendant près de 12 ans) et des autres (depuis trois ans) n’ont peut-être pas toujours été des plus judicieuses ni des plus pertinentes au moment où elles ont été prises.
Mais sur le long terme, la façon dont le pays a su mener sa barque sur les eaux pour le moins tumultueuses de la mondialisation a de quoi nourrir, à l’intérieur des frontières, un certain sentiment de fierté, sans doute proportionnel à la jalousie suscitée au-delà. Puissent les dirigeants politiques s’en souvenir plus que jamais alors que se profilent trois années pour le moins passionnantes dans la perspective d’élections communales, nationales et européennes (mais au sein de quelle Europe?).
Les habituelles manœuvres et jeux politiciens vont reprendre de plus belle, dans des joutes qui n’élèveront pas toujours le débat aussi haut qu’il devrait l’être. Pas sûr qu’elles soient indispensables à notre écosystème. En revanche, oui, nous nous en passerons bien.
Article publié sur le site de Paperjam.
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