Il y a cinq ans, le 15 septembre 2008, le monde économique et financier apprenait, stupéfait, la faillite de la plus que cent-cinquantenaire banque d’affaires Lehman Brothers. Un mastodonte présenté comme étant «too big to fail», mais un colosse aux pieds d’argile, finalement balayé par la conséquence de la crise des subprimes.
Cinq ans, c’est aussi la durée qui aurait dû être celle de la législature en cours. Officiellement intronisé par la présentation de son programme par le Premier ministre Jean-Claude Juncker, le 29 juillet 2009, le gouvernement Juncker-Asselborn II paraissait, lui aussi, bien solide sur ses fondations. Mais pas assez, finalement, pour résister aux vents mauvais qui ont soufflé dans les alcôves de la commission parlementaire sur les services de renseignement de l’État.
Rien n'est permanent sauf le changement, aimait à rappeler feu Edmond Israël, citant le philosophe grec Héraclite. La disparition prématurée de Lehman Brothers a été à l’origine d’une profonde remise en question des mentalités et des processus guidant un certain nombre de mécanismes financiers, dont beaucoup fonctionnaient sur le principe du «Jusque-là, tout va bien».
La fin prématurée de la législature actuelle n’a évidemment rien de comparable avec la faillite d’une banque d’affaires multinationale. Mais elle intervient dans un contexte où les appels à changer les mentalités et à revoir certains modes de fonctionnement se font de plus en plus insistants. Ils émanent tout autant de la société civile que de certains politiciens qui ont (ou au moins donnent l’impression d’avoir) le courage de sortir de leur zone de confort.
D’une certaine façon, c’est donc tout un système politique qui, aux yeux de certains, apparaît lui aussi au bord de la faillite. L’Association de protection des investisseurs, Protinvest, ne vient-elle pas de le faire ouvertement remarquer dans sa lettre adressée au commissaire européen pour le marché intérieur et les services, Michel Barnier?
Une missive qui a les allures d’un missile envoyé contre le gouvernement en général (et le ministère des Finances en particulier) et son mode de gouvernance. Elle y dénonce notamment la nomination d’un même haut fonctionnaire du ministère à la fois à la présidence de la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF), et dans les conseils de la Bil et de la Bourse de Luxembourg, soit deux entités contrôlées par la CSSF.
«Ceci met en doute l'approche de l'indépendance de la supervision du secteur financier au Luxembourg telle que pratiquée par le ministre des Finances», conclut, sèchement, l’association.
Dans cinq semaines, les électeurs décideront – en partie – du visage qu’aura le nouveau gouvernement. Une équipe exécutive pour qui les compteurs seront remis à zéro pour un nouveau bail de cinq ans… ou moins. Mais bien d’autres curseurs devront également être réinitialisés. Faute de quoi, certains anniversaires à venir risquent fort d’avoir le même goût amer que celui de Lehman…
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